Thierry Arcaix

Communication, culture et patrimoine

L'histoire d'un bon plan

  1. Souvenirs du plan Cabanes
  2. Les archives municipales
  3. Cinquante-trois pétitionnaires
  4. La réponse municipale, le 10 juin 1924
  5. La question Salengro-Plan Renouvier
  6. La solution hygiénique
  7. Naissance d'un square Plan Renouvier
  8. Vue aérienne Cabanes-Salengro

1- Souvenirs du marché du Plan Cabanes

marchegitanA l’heure où prend acte la mutation définitive du marché du Plan Cabanes (ou Cabane) à Montpellier, en bons Figuerollogues il nous fallait écrire en quelque sorte son épitaphe provisoire. Si nous connaissons la date de sa fin, si nous avons de bons contacts avec son fils, le marché de la place Salengro, si nous avons les noms de ses héritiers, à savoir un marché aux livres et à la brocante chaque mercredi, un marché aux fleurs une fois par semaine et un marché d’artisanat d’art deux fois par mois, il nous manquait sa date de naissance. Enquête compliquée. En fait, nous n’avons trouvé rien de très sûr dans la mémoire vivante. Certains disaient qu’il était là depuis plus de cent ans, d’autres qu’il se tenait jadis le long du Cours Gambetta, et c’était surtout des gens dont on se souvenait le plus : la Marseillaise et ses cagaraoulettes (petits escargots) ; Adrienne, la poissonnière, ou encore les volailles de la Devèze. Alors, échec ?

2- Les archives municipales

Il restait une piste, celle des archives municipales. Mais comment trouver une quelconque délibération quand on ne connaît pas, à plus de 50 ans près, la date à laquelle elle a été établie ! Il faut voir la taille des registres, leur complexité. Mais à l’Hérault du Jour, on ne recule devant rien. Première matinée à ouvrir des dossiers et à parcourir des lignes d’écriture, sans résultats. Le personnel des archives était aussi fort déçu et ne cessait d’émettre des hypothèses de recherches, allant jusqu’à solliciter Mme la Conservatrice elle-même. Pause déjeuner et retour aux dossiers. Et c’est le coup de chance. Dans un dossier intitulé Halles et marchés, un sous-dossier « marché aux fourrages et aux bois de chauffage » que j’ouvre machinalement. Bonne pioche…

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3- Cinquante-trois pétitionnaires

Tout d’abord, une lettre adressée à M. Gibert, Maire de Montpellier, en mai 1924, sous forme de pétition (53 signatures). « Les soussignés ont l’honneur de vous exposer que la rue du Courreau et le Plan Cabanes ont été autrefois le centre d’une très grande activité commerciale. Par suite de la création de la ligne des chemins de fer de l’Hérault et des autobus départementaux desservant les villages environnants, le trafic a été détourné de ce centre. En effet, ces diverses entreprises de transport, certes profitables à l’intérêt général, ont amené néanmoins la disparition des petits voituriers remisant dans les affenages du Courreau et faisant le service entre les villages et Montpellier. De ce fait, le Courreau n’étant plus le point de départ et d’arrivée de nombreux voyageurs, le trafic dans cette artère à sensiblement diminué. Cette situation créé aux commerçants du quartier et particulièrement aux exposants un sérieux préjudice. En conséquence, ils vous demandent, M. le Maire, de bien vouloir intervenir auprès du Conseil Municipal afin qu’un peu de trafic soit canalisé vers eux, en compensation de la grosse perte qu’ils subissent depuis longtemps. Persuadés qu’ils ne procurent aucun avantage aux rares commerçants les avoisinants, ils vous seraient obligés de faire décider qu’à l’avenir, le marché des bois de chauffage (cours Gambetta) et le marché des plans de vigne (place Saint Côme) soient transférés au Plan Cabanes, en faisant placer deux ou trois lampes électriques sur le parcours. »

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4- La réponse municipale, le 10 juin 1924 :

« On ne peut pas songer de porter le marché des plants de vigne de la place St Côme au plan Cabanes. Ce marché est lié à la réunion des propriétaires et courtiers, le mardi, Place de la Comédie, et les intéressés ont à diverses reprises demandé qu’il soit porté plus à proximité de ce centre d’affaires vinicoles. Mais on pourrait envisager le déplacement du marché des bois de chauffage. Ce dernier se trouve à proximité, sur le cours Gambetta, du lieu de départ et d’arrivée des autobus et la circulation y est devenue intense. Les véhicules des marchands de bois de chauffage pourraient être placés tout autour du Plan Cabanes de façon à ne pas gêner la circulation et à laisser le libre accès des magasins et des maisons voisines. » On en arrive donc à l’arrêté du 23 juin 1924 : « L’article 41 de l’arrêté du 23 janvier 1922 portant règlement des halles et marchés est modifié ainsi qu’il suit : Un marché aux fourrages et bois de chauffage est établi : 1- sur la place des patriotes, entre les rues de la Cavalerie et de Lunaret ; 2- Au plan Cabanes, autour de la promenade ». Notre marché était donc né un 23 juin , pour plus de 82 ans d’existence…

5- La question Salengro-Plan Renouvier

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Bien que cela n’ait qu’une importance relative, il est amusant de constater que, pendant que le Plan Cabanes vivait ses grandes heures du bois de chauffage et du fourrage, le Plan Renouvier (Salengro) était déjà un petit marché. Un aller-retour régulier entre ces deux espaces, qui n’est d’ailleurs probablement pas terminé. Mais revenons aux archives. Le directeur du service d’Hygiène à M. le Maire de la ville de Montpellier, le 18 juin 1924 : « La route de Lavérune à son origine, (je veux dire au niveau du plan Renouvier) est occupée tous les matins de 7 heures à midi par des baladeuses au nombre de 10 environ dont trois vendent du poisson. Deux seulement ont autorisation régulière de stationner en cet endroit. Or, cet agglomérat, relativement important, de voitures ambulantes, encombre la voie publique. D’autre part, la poussière élevée par les autos en cet endroit très passager se répand à tout instant sur les denrées alimentaires.

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6- La solution hygiénique

Il y aurait possibilité d’éviter en majeure part ces deux inconvénients. Les vendeuses pourraient se réunir sur le refuge lui-même qui se trouve en marge de l’artère principale. Un marché volant serait ainsi créé. Si la ville consentait à cimenter ce plan en bordure sur une largeur de 2 mètres, et longueur de 30 mètres, le nettoyage serait extrêmement facile et la dépense peu élevée. »M. le Maire : « En ce qui me concerne, je ne vois aucun inconvénient à la proposition de M. le Directeur du Service d’Hygiène. Cette bande cimentée suffirait à contenir les marchandes ambulantes qu’on obligerait à occuper cet emplacement ; l’artère principale serait dégagée et les marchandises exposées à la vente seraient ainsi garanties de la poussière soulevée par les nombreux véhicules empruntant la route de Lavérune ». Et on va retrouver officiellement la trace de ces marchandes, les « baladeuses », sur ce lieu, (dont l’appellation oscille entre plan Renouvier et place Salengro) en 1936.

7- Naissance d'un square Plan Renouvier

Le 27 juin 1936, l’architecte de la Ville, M. Marcel Bernard répondait à la commande qui lui avait été passée concernant la transformation en square du plan Renouvier.

2 axes forts définissaient son projet : 1- Réserver un emplacement permettant le stationnement d’une dizaine de marchands de quatre saisons. 2- Aménager le square en rapport avec la nombreuse population enfantine de ce quartier. « Les marchands se trouvent en avant de la place (côté Figuerolles), cette partie est séparée par un mur bahut surmonté d’une jardinière. Une clôture est prévue en précaution contre les accidents. Dans le square, l’installation de bancs, d’une fontaine de l’autre côté (vers place Bouschet de Bernard), de tables à sable pour les jeux des enfants. A l’extérieur du square, un urinoir sera adossé au nouveau transformateur. La transformation de l’ancien transformateur en kiosque à journaux est rejetée ». L’architecte recevra un avis favorable le 7 juillet 1936, avec une seule mention restrictive qui concernait les marchandes des quatre saisons : « Nous estimons qu’elles pourraient s’installer purement et simplement sur le refuge lui-même, sans qu’il soit nécessaire de le morceler. Il nous semble que les marchandes seraient ainsi moins à l’étroit et que les acheteuses seraient plus à l’aise pour circuler ». Et plusieurs plans sont archivés. On y voit une disposition fort harmonieuse, avec 2 grands bacs à sable, une haie de fusains, la fontaine, les bancs.
Peut- être en avez-vous le souvenir. N’hésitez pas à me contacter. (article publié le dimanche 26 août 2007 dans l'Hérault du Jour)

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8- Vue aérienne

 

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mél : thierry.arcaix@wanadoo.fr ; tél : 06 23 10 62 21